mardi, janvier 13

Satisfait ou remboursé


Je ne suis pas la première à m'extasier sur les services après-vente américains. Ici le "customer service" est à l'avant-scène, il rutile, ce n'est pas le bureau au fond du couloir, celui qui n'a même pas un calendrier périmé punaisé au crépi beigeasse et où on colle Bruno, le stagiaire abruti, mais filleul de la femme du meilleur pote du délégué du personnel.

Ici, oui, le client a le droit de changer d'avis après l'achat d'un tapis en moumoute turquoise de 12m², et s'il trouve que son jus d'orange a un drôle de goût on ne lui répond pas que l'un de ses plombages doit être pourri, comme ne manquerait pas de le faire Bruno.
Mais non, mais non, pas de problème, on présente ses plates excuses, on rembourse, on échange, on distribue des bons d'achats ou, si la réclamation ne nécessite pas autant de petites attentions conjuratoires de procès, des gadgets un peu nases au logo de la marque, on conseille, on ne discute pas et on espère que le client reviendra dépenser plein de sous chez nous très bientôt.

Donc les premiers temps, j'étais impressionnée : y'a pas à dire, ces Américains ont le sens du service. Puis, après avoir eu affaire en six mois à plus de "customers services" américains qu'en quinze ans en France, le constat s'est jeté sous mes roues : l'importance et le soin apporté aux services clients est proportionnel aux recours, et si on y va aussi souvent, c'est que la qualité des produits laisse à désirer ma pauvre Simone.

Reprenons les choses dans l'ordre :
- Chez notre suédois préféré, les rideaux ont des trous, la visserie des meubles à monter est souvent incomplète, et les plantes vertes ont une durée de vie égale au temps qu'il vous faut pour rentrer chez vous, et encore. Bonjour la standardisation mondialisée, tiens. On se croirait dans les années 80 en France, quand il fallait bien trois passages chez le suédois avant de pouvoir monter une malheureuse Billy.

- Chez "Les bébés c'est nous", il y avait l'année dernière un pervers qui sévissait dans le rayon barrières de sécurité en retirant des pièces des emballages ou en endommageant les barreaux. Nous ne saurons jamais ce qui motivait ce désespéré mais comme je ne peux pas garantir la fin de ses activités, surtout faites suivre toute information à ce blog qui transmettra. Acheter 4 barrières identiques nous aura largement permis de roder le moteur de la voiture.

- Chez "La cible", les pantalons achetés pour fiston en 18 mois ont un tour de taille qui conviendrait à son grand frère de 4 ans.

- Chez "La cible" toujours, j'ai acheté une caisse enregistreuse à fiston qui est un maniaque compulsif du bouton qui fait du bruit quand on appuie dessus. Je précise parce qu'il y a deux écoles irréconciliables, voyez. Par exemple, son copain Léonard aime toutes les télécommandes, avec ou sans piles, il s'en moque. Fiston non, il faut qu'il se passe quelque chose sinon où est le plaisir ?
Donc, une jolie caisse rouge et beige, avec un tapis qui roule, une balance qui pèse, des touches qui bipbip et un tiroir caisse qui driling quand on l'ouvre. Mais le truc le plus mieux, c'est un micro qui vous fait une voix saturée de caissière excédée par le responsable du rayon produits d'entretien qui ne répond pas à l'appel.
Pendant deux jours fiston a dû se battre pour accéder au tiroir caisse, parce que j'enchaînais les annonces et que ça rigolait jaune dans la salle repos de ma superette c'est moi qui vous le dis - "Gilbert est attendu en caisse n°2, merci" "Gilbeeert siteplé caisse n°2" "Gilbert tu as exactement deux minutes pour virer tes fesses du canapé, merciii".
Le tapis roulant nous a fait une petite frayeur mais finalement rien de méchant. Non, celui qui nous a quittés, sans prévenir, c'est le micro. Fiston a bavé dessus en lançant un ultime "pouca pouca herqui" (pour les non linguistes, je précise que herqui veut dire merci, et je calme les admiratifs, non, fiston n'est pas le fils illégitime de Nadine de Rothschild, mais plutôt celui d'un perroquet. La signification de Pouca, par contre, reste obscure, avis aux experts), et fini, plus rien. Je suis à deux doigts d'aller pleurer chez "La cible", mais avec la bave de fiston et les traces de dents un peu partout ça va être difficile de plaider le "I don't know what happened, I just opened the box and bam, no micro." Que vais-je devenir ?

- Chez le revendeur Mieleux du coin – quand je dis le coin, c'est pas le coin de la rue hein, il faut compter une bonne heure aller-retour, on est repartis avec un aspi comme chez nous. C'est quand on a voulu s'en servir, deux mois plus tard donc, qu'on s'est aperçu que le manche principal était pété, et qu'une autre pièce aussi.
Pour les deux mois plus tard, je goleri, herqui.

- Le jour où j'en ai eu ras le pompon de courir après fiston pour essayer de l'asseoir sur sa petite chaise à l'heure du repas en collectant les bouchées à moitié mastiquées dans son sillage, une belle chaise évolutive – avec harnais - a fait son entrée dans nos vies. Super affaire sur internet, dépêchez-vous, il n'y en aura pas pour tout le monde, on se dépêche, il en reste une pour nous, ouf. La chaise pour enfant la plus chère à l'est du Pecos arrive, on (heu, Justin) la monte, et on se demande si c'est normal qu'elle soit aussi bancale. A ce niveau là, ce n'est même pas la peine d'y mettre votre bébé de six mois, autant le balancer direct par terre vous gagnerez du temps. Forcément, le temps qu'on fasse l'échange, notre couleur n'était plus dispo.

C'est à se demander s'ils n'ont pas carrément supprimé les services "contrôle qualité" en recasant le personnel dans les services après-vente.


8 commentaires:

Dodinette a dit…

c'est pas le CQ (pré-prod) qu'ils ont viré , c'est l'AQ (post-prod), et je le confirme. là où ça rigole pas c'est la bouffe, et alors c'est carrément exagéré, faut tout aspetiser et tout, mais pour le reste... bah, le customer service est là hein. et puis, ils payent de tels frais de lawyers qu'il faut bien le rentabiliser.

super billet, j'ai bien goléri, herqui. (pouca... je reste songeuse... "poubelle" ?)

Marie a dit…

Donc, Dodinette, tu confirmes...ce qui explique aussi tous les recall sur les jouets, en fait c'est les clients qui testent les produits et signalent les problèmes, c'est pas bête. Pour poubelle, non, hélas, tu as perdu : poubelle se dit "bia", c'est pourtant évident!

Anonyme a dit…

salut, et merci pour le lien.
Comme d'hab, j'ai bien rigolé en lisant ton billet, je pense qu'effectivement beaucoup de jouets pour enfants ici sont de la daube, mais je crois que tu peux le rendre avec les traces de dents et de bave, car si tu le remets bien dans le paquet, ils ne l'ouvriront pas pour regarder, ils te diront what was wrong, et tu diras, avec ton bel accent français, I picked the wrong present, et voilà. Par contre, moi aussi, je cherche un booster seat pour le petit à table, alors j'aimerais bien savoir QUOI ne pas acheter!
pouca, je me lance: s'il-te-plait?
Je n'ai plus de Suédois près de chez moi, mais je n'ai jamais eu à me plaindre de trucs manquants dans les assemblages, la faute à pas de bol, alors...

Anonyme a dit…

Concernant le mot "pouca", puis-je instiller mon grain de sel dans le débat ? J'opterai volontiers pour la formulation, approximative je te l'accorde, du fameux "pourquoi", terme existentiel s'il en est, que tout un chacun se pose dans un nombre infini de circonstances (et qui, je le précise, ne vont pas en diminuant avec l'âge, au contraire). Fiston, donc, par imitation de l'insatiable curiosité intellectuelle de ses parents, tente donc, peut-être, de poser les jalons d'un questionnement bivectoriel interne-externe en vue d'expliciter les mystères de l'émergence de son moi profond. Ou alors, ça n'a rien à voir. Martine 53

Anonyme a dit…

Votre blog est un bonheur de lecture, merci !

Billet criant de verite. J'experimente la meme chose en Pennsylvanie. Au debut, je m'emerveillais du service ; maintenant je desespere, assuree qu'au moindre achat j'ai les plus grandes chances de devoir revenir dans l'heure au magasin.

Ici, le fameux suedois, non content de ne pas mettre toute la visserie dans les boites, ne met meme plus de caissiers aux caisses. Standardisation mondialisee deshumanisee ?

Marie a dit…

Ariana, c'est mort, j'ai jeté l'emballage, toute à la joie du micro! Le booster seat nous on a abandonné l'idée depuis qu'il s'est propulsé en arrière avec les pieds avant de se fracasser au sol.
Martine53, excellent! Je pense que l'interprétation de pouca est faite...mince, serait-ce un torturé du bulbe?
Anne, oui les caisses sans personne, y'en a partout maintenant (mais même en France je crois). Je m'y suis aventurée au supermarché vu que je n'avais que 3 articles, ben ça m'a pris autant de temps que de faire la queue avec un caddie plein (le système buggait)

Flo a dit…

Le petit caddie que j'avais achete pour mon fils pour Noel est arrive avec 3 roues, au lieu de 4. Heureusement que j'ai ouvert la boite avant de l'emballer. Difficile d'expliquer a sa grande soeur de 5 ans que meme le Pere Noel a un service apres-vente...

Marie a dit…

Flo: c'est sûr que quand c'est un cadeau on a intérêt à faire gaffe (d'ailleurs ça me fait penser que jusqu'à aujourd'hui je ne vérifiais pas...j'ai dû offrir des trucs neufs déja hors d'usage)