jeudi, août 26

On prend les mêmes


Une fois n’est pas coutume, aujourd’hui je me réjouis.


Comme fiston en est à sa seconde rentrée scolaire, je deviens blasée.

A l’heure où l’année dernière le sac de fournitures à acheter était prêt depuis des semaines, étiqueté et rangé dans le coffre de la voiture en prévision de la réunion des parents d’élèves, cette année la liste a passé l’été aimantée sur le frigo, coincée entre le numéro du centre antipoison et un vieux post-it avec des noms de gens qui ont déménagé trois fois depuis.

Mais, la semaine dernière, je me suis dit comme ça « dis-donc feignasse, si ça continue cette année tu vas arriver les mains vides à la réunion, j’te parie que t’es pas cap d’y aller là, tout de suite ».


La feignasse, incapable de résister à un challenge aussi délicatement amené, a donc prit sa voiture, sa liste, et s’est lancée à l’assaut du rayon fournitures le plus proche, mais non sans avoir ingurgité deux petits cafés pour se mettre en forme car la feignasse est fatiguée, cf. billet précédent.


J’ai vaillamment arpenté le rayon pharmacie, pour trouver un spray désinfectant, puis le rayon produit d’entretien pour harponner le dernier lave vitre sous le nez d’un bonhomme qui devait faire les courses pour la première fois de sa vie vu son air dépassé devant les éponges grattounantes. La femme est est un loup pour l’homme alors j’ai poursuivi mon chemin, sans lui proposer mon aide, concentrée comme une malade sur la suite de ma liste « 100 assiettes en cartons petit format ».

Il m’a fallu vingt bonnes minutes de quête effrénée à travers les rayons pour enfin voir qu’au-dessus du paragraphe presqu’entièrement barré par mes soins, une ligne précisait « 4 years old classes ». Et quel âge il a le fiston ? 3 ans. Alors qui c’est qui va remonter d’un paragraphe et tout recommencer ? C’est pas tout les jours que la feignasse gagne un tour gratuit alors elle n’en croit pas sa chance.

Rebelote, des pansements taille normale, du sopalin, une grosse boîte de mouchoirs, un paquet de piles AAA et, rayon épicerie, de la « cream of tartar » pour fabriquer la pâte à modeler, moi qui hésite encore à me lancer dans la grande aventure de la pâte à sel, là j’étais comme deux ronds de flan entre le cumin et le poivre en grains.


Ne manquait plus que le dernier article, un tube de colle, totalement incongru au milieu du reste. Ah bon, parce qu’il ne va pas faire que se moucher, cuisiner de la fausse playdo, lécher des piles, faire les vitres et se blesser ? Il va, en plus, faire des trucs de son âge ?

Direction le rayon officiel de ceux qui vont à l’école.

J’y ai trouvé un attroupement d’employés du magasin, occupés à vider les présentoirs. Mi-août.


Et c’est là que je me réjouis.

L’automne arrive, il faut mettre Halloween en rayon, viiite.

Bientôt, heu… d’ici deux-trois semaines quand même, il fera frisquet la nuit, Joe Dassin tournera en boucle à la maison, il faudra penser à habiller les enfants, les moustiques crèveront par milliers et j’irai même cracher sur la pelouse, pour le plaisir.


mardi, août 24

C'est assez


Je sais, ça fait des siècles.

Je pourrais vous faire croire qu'un astéroïde s'est abattu dans mon jardin, avec en prime un habitant de la planète Zorglub perché dessus. Ou, plus probable, qu'une victoire soudaine à la loterie mexicaine m'a rendue zinzin et fait acheter une hacienda au Chiapas. Mais je préfère m'en tenir à une réalité encore plus incroyabilesque.


Depuis 3 mois j'enchaîne les journées d'une douzaine d'heures de présence parentale, sans école, centre aérée, colonie, nounou, gentille voisine qui serait trop contente d'avoir quelqu'un avec qui jouer, fille au pair, bref, sans solution de replis. Depuis mi-mai.

C'est l'agonie de la mère de famille, l'usure lente et quasi inéluctable de son système nerveux, la menace chaque jour plus réelle du fameux burn out qui la fera se réfugier sous un faux nom dans le Marriott de sa ville, pour passer une journée climatisée, sans être interrompue toutes les quatre secondes pour un câlin, un pipi, un tour de vélo, un truc à manger, sauver le chat d'une mort par étranglement, sans personne pour exiger des vacances, une DS et un i-phone.


On s'extasie sur les prouesses de nos équipes nationales aux Championnats d'Europe. Et nous, pauvres parents, amateurs démunis, nous qui devons être au top de nos performances chaque jour, alors qu'on n'a même pas le Bafa ni la main verte, on la mérite pas not' médaille peut-être ? Où qu'il est l'élu jovial devant le buffet froid ?

J'ai excellé au 100 m, version avec poussette et enfant suicidaire s'échappant sous les voitures.

J'ai triomphé, à fleuret moucheté, d'une bonne brochette de moustiques attaquant du matin au soir et inversement.

J'ai soulevé l'équivalent de quelques éléphants en promenant, chatouillant ou extirpant du bain deux bambins dont une plutôt dodue, mais je ne dirais pas laquelle des deux.

J'en ai fait des longueurs, des heures durant à enchaîner les figures – histoires, dessins, goûters, acrobaties, parc, repas et on recommence.

J'ai plongé, chaque soir plus profond et les pieds en avant, dans un sommeil peuplé d'Elmo grimaçants.


Allez, je ne suis pas ingrate, je n'ai pas réussi cet exploit à moi toute seule. J'ai été très soutenue et entourée par ma fédé, surtout son président. En liaison permanente avec les stocks de filtres et de paquets de café, il m'a entourée des meilleures conditions pour réussir. Merci président.


Mais l'heure de ma reconversion a bientôt sonné, dans deux semaines l'école recommence, trois matins par semaine. Possible que je verse quelques larmichettes de joie cette année.