jeudi, mars 27

Ça peut toujours être pire


La loi de Murphy, ou loi de l’emmer maximum expliquée aux nuls.
Commençons par le commencement. Hier matin.
De bonne heure, après une nuit sans interruption, donc en grande forme, me voilà partie avec fiston vers le centre ville. Comme je suis overbookée, j’avais deux trucs à caser avant l’heure de la sieste : faire faire un double de clé, et porter ma montre chez le bijoutier pour qu’il y mette une pile neuve vu que ça fait au moins trois mois que je me fie à la position du soleil pour savoir où j’en suis dans ma journée.


En cinq minutes, paf, réglé, je ressors du magasin de bricolage avec mon double de clé. Je suis toute guillerette parce que cette clé c’est pour donner à la nounou que j’ai enfin fini par trouver et qui s’occupe de fiston deux après-midi depuis la semaine dernière. A moi les promenades sans me soucier d’emporter la poussette, le goûter, des mouchoirs, un peu d’eau, quelques jouets c’est mieux, un gilet au cas où et une couche de rechange parce qu’on ne sait jamais.

Il était neuf heures et on m’a assuré que les boutiques du petit centre commercial seraient ouvertes et que comme, par le plus grand des hasards, c’est là que m’attendait ma pile toute neuve, en avant toute.
En attendant de traverser, je remarque une mère de famille avec poussette, en tenue de sport genre c’est l’été et je vais mourir de chaud alors que fiston est en combi de ski, moufles et bonnet, et que j’ai même sorti mon béret (mais que oui, quand je mets mon béret, je me promène toujours avec mon clacos et ma baguette sous le bras, pourquoi, il faut pas ?) Il fait 0,5°C.

Je traverse en regardant la sportive réchauffée pousser sa cargaison vers le mall et je me demande comment on peut être aussi pressée d’aller acheter un truc de si bon matin. Ce petit
mall est à la pointe de la déprime. La moitié des boutiques ont fermé depuis des lustres et personne n’est assez fou pour s’attendre à une reprise, et l’autre moitié ne croule pas sous la clientèle, ce qui se comprend vu la qualité des produits. Mais on peut y trouver des piles de montre alors ne crachons pas sur le beau carrelage seventies.

Je m’engouffre derrière la sportive et je remarque que l’éclairage est au minimum et qu'absolument tout est fermé. Mais je croise plusieurs femmes et j’entends des cris, c’est très bizarre. Je mets quelques secondes à réaliser que l’étage où je suis sert de piste d’entraînement à une armée de mères à poussettes qui courent en rond tout autour du puit central, encouragées par le sosie de Barbie qui hurle des « Great job girls, yahou ! » en poussant Skipper dans une poussette sport rose.
J’ai quand même fait le tour de l’étage pour m’assurer que la bijouterie était bien fermée, en manteau, béret et limite mes après-ski, doublée par ces joggeuses en shorts aux enfants ballottés mais stoïques car endormis ou la bouche pleine, et répondant aux cris enthousiastes de leur meneuse par des « yeah, youhou » suraigus.

Fiston me jetait des regards en coin en rigolant : pour lui dès qu’il y a du monde et du bruit, c’est le meilleur moment de sa vie. Moi je le cachais bien mais à l’intérieur j’étais pliée de rire, yahou.
C’est à partir de ce moment que les choses ont commencé à se gâter et je ne sais pas si je dois y voir un rapport, une malédiction des Dieux du stade courroucés par mon hilarité ?

Arrivée à la maison, je me rends compte que le double de la clé ne fonctionne pas, rien à faire. Réjouissons-nous, je n’ai pas cassé la serrure en forçant comme une brutasse.
Après le déjeuner de fiston, je me rue donc à nouveau au magasin de bricolage, en espérant avoir ma clé avant l’arrivée de la nounou. C’est que ce serait dommage de rester bloquée à la maison, ce n’est pas trop le but de la manœuvre. Le gars observe sa copie, en refait une autre en me disant qu’à son avis ça ne changera pas grand-chose. Ne me demandez pas pourquoi une clé toute simple et qui fonctionne impeccablement ne peut pas être dupliquée, il doit y avoir une raison que la raison ignore.

J’enchaîne, direction la bijouterie. La vendeuse change la pile, referme la montre en oubliant une pièce, rouvre, a du mal à refermer, s’énerve un peu et finit par me tendre ce qui s’avère être une montre cassée. Je reste calme – il va falloir que je pique un sprint pour arriver avant la nounou – et je lui explique qu’elle a pété ma montre, qu’il va donc falloir qu’elle la répare. Elle fait l’étonnée « Ah bon, elle est cassée ? », mais accepte de la montrer au bijoutier quand il reviendra, c’est trop gentil.
La nounou arrive, je lui explique que ce n’est pas que je n’ai pas confiance mais il va falloir attendre pour la clé, et pour me rattraper, je lui tends le contrat qu’on a fini par remplir. Oh ben c’était pas la peine parce qu’elle a trouvé quelque chose à temps complet et donc, elle fait ses deux aprèm cette semaine et basta. La semaine prochaine je suis seule avec fiston pour 8 jours, avec 0 nounou donc.
Je me couche déprimée, l’impression que tout part de travers et Justin me rappelle que ça peut toujours être pire, toujours, loi de Murphy oblige.
La confirmation ne s'est pas faite attendre. Le lendemain matin, courses avec fiston au Safeway du coin. Au moment de sortir du parking, plein de gens qui marchent partout sans regarder, moi qui fais attention à ne tuer personne et bam, le poteau. Aile éraflée, portière idem,
ratio heures de conduite/accidents qui en reprend un petit coup pour la route et moral en chute libre. Et signe qui ne trompe pas, indice absolu de la poisse intégrale : mon pain d’épices est resté collé au moule.
Alors je prends tout : prêtre vaudou pour désenvoûtement, exorciste ou chaman cherokee, il me faut quelqu’un de toute urgence, même d’occase.



jeudi, mars 20

Souriez, vous êtes matés

J’ai déjà eu l’occasion de vous signaler comme parfois la vie d’une mère de famille peut virer au casse-tête.

Ellen « Treffly » Coyne en a fait les frais, le 8 décembre dernier, lorsque lui est venue l’idée d’emmener ses 3 enfants et la fille d’un voisin au Wal-Mart du coin, pour que les filles puissent donner les sous qu’elles avaient récoltés pour aider les sans-abri.

« Treffly », qui a un petit nom à coucher dehors soit dit en passant, s’est garée à moins de 10 mètres de l’endroit de la quête. Il caillait et, en plus, il bruinait, sa petite dernière de deux ans dormait dans le siège auto, et ses deux autres filles et la voisine n’avaient besoin que de quelques minutes pour déposer leurs sous, sourire à l’objectif de « Treffly » décidée à immortaliser ce joli conte de Noël, et hop, emballé c’est pesé. Pas besoin de transformer un saut de puce en véritable expédition, bébé hurleur en prime.

Ce qui fut dit fut fait, sauf qu’en revenant vers son véhicule, «Treffly » s’est fait arrêter, menottes, hurlements de policiers et tout le tralala parce qu’elle avait mis la vie de sa fille en danger en la laissant dans une voiture tiède, portes verrouillées et alarme activée pendant cinq minutes à tout casser, tout en étant à moins de dix mètres et n’ayant jamais perdu le véhicule des yeux… au lieu de la réveiller et de la prendre avec elle sous le crachin.

On aurait presque envie de sourire devant tant d’énormité, mais sachez qu’elle risquait tout de même 1 an de prison et jusqu’à 2500$ d’amende.

Tout est bien qui finit bien puisque les charges ont été abandonnées la semaine dernière.

Il faut dire que la « Treffly » a été aidée par le fait que les flics ont tout bonnement oublié de récupérer ses deux filles (8 et 9 ans), qu’ils avaient mises à l’intérieur du Wal-Mart le temps que « Treffly » soit emmenée au poste, et qu’elles y ont donc passé de longues heures, livrées à elles-mêmes, et qu’elles avaient trop peur des policiers pour demander de l’aide. Difficile après ça de venir témoigner en accusant cette femme de ne pas surveiller suffisamment ses enfants.

Comme cette affaire a fait beaucoup de bruit ces derniers jours, je l’avais à l’esprit hier, quand rentrant de la « Y », sous une pluie battante, je me suis dit que c’était le moment idéal pour m’arrêter récupérer un costume de Justin chez le teinturier. Je m’approche et je vois une place de parking pile face à la porte de la boutique. Il tombait des trombes d’eau, j’avais payé la veille et la patronne se souvient toujours de mon nom, donc je savais que j’allais en avoir pour moins d’une minute. J’ai décidé de faire ma « Treffly » et j’ai laissé fiston au sec. Je suis entrée dans la boutique, récupéré le costume que la patronne était déjà en train de me tendre, et je suis ressortie. Chrono, 30 secondes, bonjour-au revoir inclus. Et bien croyez-le ou non, la conductrice de la voiture d’à-côté était au volant et attendait que je revienne, montre en main et, j’imagine, prête à composer le numéro des flics. J’ai eu droit à un regard scandalisé et presque haineux.

Je dirais deux mots : au secours.


samedi, mars 8

Au voleur !

J’étais en train de vous concocter un petit texte sur un sujet qui me trottait dans la tête depuis un bon moment. Je prenais mon temps, je peaufinais parce que je voulais que ce soit drôle, pas trop cliché mais quand même chouette à lire enfin, vous voyez quoi. Et puis ce n’est pas comme si je n’avais rien d’autre à faire non plus – ça c’est pour ceux qui seraient tentés de me dire « mais alors, ton blog se meurt, qu’est-ce que tu fais de tes journées ? » Je passe, entre autre, un temps infini à relever un fiston qui se laisse tomber sur son derrière rembourré et tient pour acquis le fait que je vais le relever et le remettre en bonne position pour gesticuler un peu avant de se laisser retomber. En ce moment je fais tire-fesse.

Mais ça n’empêche pas de cogiter. Alors j’ai profité de mes séances de natation pour chercher des idées et prendre des notes mentales – trois longueurs à me répéter la même phrase comme si c’était un joyau de la langue française, puis deux longueurs à tenter de m’en souvenir, suivies par au moins quatre longueurs à constater le déclin de ma mémoire, à repenser à un reportage sur les coraux au cours duquel on voyait des plongeurs qui dessinaient sur des tablettes amphibies et à me dire que j’ai trouvé la solution et qu’il ne me reste plus qu’à nager avec une de ces tablettes pour sauvegarder mes traits de génie, pour ensuite constater avec dépit que j’en suis arrivée par je ne sais quel chemin mental, à me dire que fatalement, gênée par la tablette, je finirais par nager aussi vite que ma voisine de ligne qui est assez lente et fait de grands mouvements de bras qui donnent l’impression qu’elle est sur le point de se noyer alors qu’en fait elle nage, et que nager à sa vitesse ça ne rentabilise pas trop l’effort de s’être mise en maillot et tout le toutim, d’autant que le maître-nageur finirait par me faire dégager de ma ligne qui a un panneau qui dit « fast », donc j’accélère pour ne pas me faire virer, même si la piscine est aux trois-quarts vide, et pour finir je me demande comment j’en suis venue à m’intéresser au règlement intérieur de la piscine et au fait que les surveillants ont tous l’air d’avoir largement dépassé l’âge de la retraite et qu’en cas de noyade j’ai des doutes sur les taux de sauvetage.

Mes phrases, si joliment construites, à l’équilibre parfait et à l’humour croustillant sous la dent sont tombées au fond de la piscine, où elles tiennent dorénavant compagnie au petit pull marine d’Isabelle Adjani, maigre consolation s’il en est.

J’allais mettre les bouchées doubles pour boucler ce post quand, paf, Justin m’appelle dans le bureau et me montre un article du Monde à l’écran.
Comment est-ce que c’est possible qu’un journal français fasse un article sur le même sujet que moi, pile poil, alors qu’il ne s’approche ni de près, ni de loin, à quoi que ce soit qui puisse ressembler à de l’actualité ? Hein, je vous le demande : la « mère hélicoptère », c’était mon idée, pourquoi me la piquer ?

Je suis restée la bouche ouverte de stupéfaction, à me demander qui avait bien pu me balancer.

Et puis tout de suite après je me suis demandée si y’avait moyen d’attaquer pour plagiat, mais là je crois que ça va être duraille, surtout que je n’ai pas encore fini d’écrire.

Alors, qui m’a vendue au Monde ? Qui est en mal d’inspiration au point d’installer des mouchards dans les ordis d’honnêtes bloggeurs, si ce n’est pas malheureux de voir ça ?

Du coup, pour mon texte, il va falloir attendre parce que le sujet étant devenu chaud-bouillant, j’ai peur de déclencher un phénomène, un truc incontrôlable où je me retrouverais bombardée spécialiste et où je serais obligée de fournir des explications, des analyses et des conclusions, voire des conseils.

Donc, je tourne le dos à cet avenir de gloire, de respectabilité scientifique et de petits-fours au pâté et je retourne à mon obscur labeur de tire-fesse.